Une personne publique est tenue de conserver un certain nombre de documents qu'elle produit ou qu’elle reçoit dans le cadre de ses activités. Il s’agit à la fois d’une obligation légale, d’un impératif d'organisation et d’un devoir vis-à-vis des générations futures, les archives étant la mémoire de Pôle emploi et devant refléter fidèlement son histoire.
Les premières règles de gestion documentaire et d’archivage de Pôle emploi ont été établies en 2010[1] et concernaient uniquement les structures territoriales (directions régionales, directions territoriales, agences). Il était nécessaire de les revoir pour tenir compte à la fois des évolutions survenues dans les activités de Pôle emploi et des activités de la direction générale. Ont ainsi notamment été intégrés les domaines de l’orientation et de la formation professionnelle, de la responsabilité sociétale et environnementale, de la stratégie ou encore de la trésorerie.
Les nouvelles règles ont été élaborées avec l’ensemble des services de la direction générale, les directions régionales, Pôle emploi services (PES) et la direction des systèmes d’information (DSI). S’agissant en particulier des documents traités en agence, un groupe de travail réunissant des représentants des différentes structures territoriales de six directions régionales a été constitué. Il a été attentif à prendre en compte les pratiques du terrain, tout en respectant les prescriptions de l’Unedic s’agissant des archives de l’assurance chômage[2].
Ces règles ont été validées par le service interministériel des archives de France[3]. Pôle emploi peut se prévaloir des délais de conservation ainsi arrêtés, qui sont opposables aux tiers.
Partie 1. Définitions et statut des archives de Pôle emploi
L’article L. 211-1 du code du patrimoine dispose que les archives sont « l'ensemble des documents, y compris les données, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, produits ou reçus par toute personne physique ou morale et par tout service ou organisme public ou privé dans l'exercice de leur activité ». L’article L. 211-4 du même code définit par ailleurs les archives publiques comme « les documents qui procèdent de l'activité de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics et des autres personnes morales de droit public ».
Il en résulte que tous les documents produits ou détenus par Pôle emploi, établissement public, quel que soit leur support, sont des archives publiques, soumises à la réglementation sur les archives publiques. Dans un souci de simplification, on considère que les règles définies pour les documents produits et reçus par Pôle emploi s’appliquent également aux documents détenus par Pôle emploi se rapportant au fonctionnement des ex-Assédic, du Garp[4] et de l’établissement de l’Unédic de Saint-Pierre-et-Miquelon, qui sont de statut privé.
La réglementation sur les archives publiques distingue plusieurs catégories d’archives[5] :
- les archives courantes sont les documents d'utilisation habituelle dans le cadre des activités de l’établissement qui les a produits ou reçus ;
- les archives intermédiaires sont les documents qui ont cessé d'être considérés comme archives courantes mais qui, du fait de leur intérêt administratif, ne peuvent pas encore faire l'objet d’une sélection ou d'une élimination ;
- les archives définitives sont les documents qui sont à conserver sans limitation de durée.
Pôle emploi est responsable de la gestion et de la conservation des archives courantes et intermédiaires. Ces activités peuvent toutefois être confiées à un prestataire agréé par l’administration des archives pour la conservation des archives publiques sur support papier ou sur support électronique[6].
Partie 2. Les tableaux de gestion documentaire et d’archivage
Les tableaux de gestion documentaire et d’archivage sont joints en annexes 1 et 2. Ils déterminent, pour les différentes catégories de documents produits ou reçus par Pôle emploi, leur durée d'utilité administrative et les options finales de conservation ou destruction. Ces règles s’appliquent quel que soit le support des documents (papier ou électronique).
2.1. Les apports des nouveaux tableaux
Les travaux d’actualisation des tableaux de gestion documentaire et d’archivage ont été conduits dans le souci d’harmoniser au maximum les délais de conservation des documents traités dans le cadre d’une même activité, ainsi que dans une optique de simplification pour les agences. En particulier, des activités auparavant distinctes ont été regroupées en cohérence avec les pratiques du terrain. Notamment, les documents relatifs à l’inscription sur la liste des demandeurs d’emploi et la demande d’allocation sont réunis dans une catégorie unique « gestion des droits », assortie d’un délai de conservation de 6 ans.
Chaque fois que cela a été possible, les délais de conservation ont par ailleurs été réduits[7]. C’est notamment le cas pour les dossiers de carrière des agents (de 90 à 80 ans), les aides versées aux demandeurs d’emploi (de 10 à 6 ans) ou les conventions (de 10 à 5 ans). En outre, le nombre de documents à éliminer à l’issue de la durée d'utilité administrative est en augmentation. Tout particulièrement, les documents relevant de la catégorie « gestion des droits » sont désormais détruits, alors qu’ils faisaient antérieurement l’objet d’un tri. Ce sont les données contenues dans le système d’information qui sont versées aux services d’archives.
Enfin, l’actualisation a été l’occasion d’identifier le support (papier et/ou électronique), ainsi que la structure responsable de la conservation du document.
En pratique pour les agences :
- une catégorie unique « gestion des droits » regroupe les documents relatifs à l’inscription sur la liste des demandeurs d’emploi et la demande d’allocation ;
- un seul délai de conservation de 6 ans pour la gestion des droits, les aides de Pôle emploi et les prestations aux demandeurs d’emploi (5 ans à compte de la fin de la prestation, donc 6 ans) ;
- sauf choix d’organisation différent, tous ces documents peuvent être intégrés dans le classement journalier.
2.2. Les durées de conservation et le sort final des documents
Les tableaux de gestion documentaire et d’archivage précisent :
- les types de documents produits et reçus ;
- le nombre d'années durant lesquelles ils sont utiles et doivent être conservés en fonction des droits et obligations qui s'y attachent (durée d’utilité administrative ou DUA) ;
- la décision à appliquer lorsque la durée indiquée est expirée. A ce titre, les mentions portées dans la colonne « sort final » se lisent de la façon suivante :
- V : versement au service d’archives ;
- D : destruction au terme de la durée d’utilité administrative (DUA) ;
- T : tri des documents selon les modalités définies dans la colonne « observations » ;
- la structure responsable de la conservation des documents jusqu’à l’application du sort final.
Lorsque des documents sur support papier de typologies et de durées d’utilité administrative différentes sont conservés dans un même dossier, la durée de conservation la plus longue s’applique.
Un mode d’emploi des tableaux figure en annexe 3.
2.3. Les supports
Les archives de Pôle emploi sont désormais mixtes, physiques et/ou numériques[8]. C’est pourquoi les nouveaux tableaux de gestion documentaire et d’archivage précisent, pour chaque type de document, son support papier et/ou électronique. Le cas échéant, la durée d’utilité administrative fixée pour les documents nativement électroniques ou numérisés s’applique également aux documents qui existaient antérieurement dans un format papier.
Un document établi sur un support doit en principe être conservé sur ce support.
2.3.1. Les documents sur support papier
Les documents établis sur support papier doivent impérativement être conservés sur ce support, particulièrement les originaux signés, tels que les actes notariés, les conventions, les marchés publics jusqu’en octobre 2018, les baux, etc.
2.3.2. Les documents nativement électroniques
Les documents nativement électroniques et qui n’existent plus sur support papier doivent être conservés sous ce format dans un outil informatique garantissant la fiabilité, l’intégrité, la pérennité et la sécurité des documents et répondant aux exigences d’un archivage électronique[9], c’est-à-dire a minima dans un outil de gestion électronique de document (GED). On rappelle sur ce point que la production et le stockage de documents bureautiques sur un répertoire personnel ou partagé ne satisfont pas aux exigences de l’archivage électronique (accès non limité, suppression possible d’un simple clic, etc.).
Parmi les documents nativement électroniques conservés sous cette forme, on peut citer par exemple les entretiens professionnels annuels (SIRHUS), les fiches de contrôle interne (RCMA[10]), certains courriers sortants à destination des demandeurs d’emploi ou entreprises (GED DE et E), les grands livres comptables et les factures (GED comptable et Chorus), etc. Il est à noter que les documents numérisés par un tiers parvenant à Pôle emploi selon un processus dématérialisé sont considérés comme des documents nativement électroniques. Il s’agit notamment des documents téléchargés (uploadés) ou numérisés par les demandeurs d’emploi en agence[11] et des livrables transmis via Prest’@ppli.
2.3.3. Les documents numérisés
Les documents numérisés, pour en faciliter la gestion, peuvent être conservés sous cette forme numérisée, dans les mêmes conditions que les documents nativement électroniques. Le papier peut être détruit après la numérisation si et seulement si des conditions strictes sont respectées, qui dépendent de la valeur probatoire que l’on entend conférer aux documents.
Ainsi, pour les documents pour lesquels Pôle emploi estime qu’ils doivent bénéficier d’une présomption de fiabilité, le procédé de reproduction et de conservation des copies doit satisfaire aux conditions prévues par les textes, en particulier le décret n° 2016-1673 du 5 décembre 2016 relatif à la fiabilité des copies et pris pour l’application de l’article 1379 du code civil.
Pour les documents pour lesquels Pôle emploi estime qu’il n’est pas nécessaire de disposer d’une présomption de fiabilité, l’ensemble du processus doit être conforme à des règles auditables[12] et les fichiers doivent être intégrés a minima dans une gestion électronique des documents (GED). C’est le cas à Pôle emploi de l’attestation employeur transmise par le demandeur d’emploi ou de certains justificatifs tels que les copies des contrats de travail ou des bulletins de salaire en cas de reprise d’activité.
Il est à noter que, dans tous les cas, l’élimination après numérisation des originaux papier demeure soumise au visa de l’administration des archives (cf. point 3.1). Une autorisation d’élimination des documents papier a été délivrée par les archives de France pour les seuls documents numérisés par les prestataires[13]. Pour les documents scannés en agence (par exemple, les documents déposés par un demandeur d’emploi dans la boîte aux lettres), le processus n’étant pas auditable, il convient de conserver les documents papier jusqu’à nouvel ordre.
2.4. Le responsable de la conservation
Les nouveaux tableaux de gestion documentaire et d’archivage précisent, pour chaque type de document, le responsable de la conservation, c’est-à-dire le métier utilisateur du document. Cette information permet d’identifier la structure détentrice du document recherché. Les structures qui ne sont pas identifiées comme responsables de la conservation du document peuvent détruire les doublons ou copies qu’elles détiennent, ce qui a pour avantage d’en réduire le nombre.
Lorsque la responsabilité de la conservation du document relève de la direction générale ou de la direction des systèmes d’information (DSI), le nom de la direction responsable est indiqué. Pour les directions régionales et autres établissements, cette mention est à compléter par leur soin, en fonction de leur organisation, si celle-ci diffère de celle de la direction générale.
Le support du document a un impact sur la structure chargée de sa conservation :
- lorsque le document original est sur support papier, la structure responsable de sa conservation et de son archivage est la structure qui l’a produit ou reçu (sauf organisation spécifique) ;
- lorsque le document est nativement électronique ou numérisé et qu’il est conservé dans un outil national de gestion électronique des documents (GED), la responsabilité de sa conservation et de son archivage revient alors à la direction concernée au sein de la direction générale.
Partie 3. Le cycle de vie des documents
3.1 L’élimination des archives courantes et intermédiaires
Les documents dépourvus d’utilité administrative ou d’intérêt historique ou scientifique ne peuvent être éliminés qu’après accord de la personne en charge du contrôle scientifique et technique de l’Etat sur les archives[14], c’est-à-dire :
- le directeur du service d’archives du département où est localisée la structure territoriale concernée (direction régionale, direction territoriale, agence, plateforme, …) ;
- le conservateur, chef de la mission des archives de France auprès des ministères sociaux, pour la direction générale, la direction des systèmes d’information (DSI) et Pôle emploi services (PES).
Quel que soit le support, les archives sont éliminées selon la procédure suivante :
- un bordereau d’élimination est transmis pour visa à la personne en charge du contrôle scientifique et technique de l’Etat sur les archives. Pour les structures territoriales, le modèle de bordereau est fourni par chaque service départemental d’archives[15] ;
- une fois le visa obtenu, le service est autorisé à détruire ou faire détruire les documents listés dans le bordereau. On rappelle que pour les documents papier, la destruction doit obligatoirement intervenir par dénaturation (déchiquetage, broyage), puis recyclage. En cas d’externalisation, un certificat de destruction doit être exigé du prestataire.
Pour les documents électroniques (nativement électroniques ou numérisés) conservés dans une GED nationale, en accord avec les archives de France, ainsi que pour les archives de la direction générale, de la direction des systèmes d’information (DSI) et de Pôle emploi services (PES), la direction des affaires juridiques (DAJ) se charge d’obtenir l’autorisation d’élimination[16].
Pour ceux des documents comportant des données à caractère personnel, les durées de conservation prévues dans les tableaux de gestion documentaire et d’archivage doivent être respectées strictement, conformément aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. Ceci permet de respecter le droit à l’oubli des personnes.
3.2 La conservation des archives définitives
Les archives définitives de Pôle emploi doivent être versées au service d’archives compétent[17] :
- le service d’archives du département où est localisée la structure territoriale concernée (direction régionale, direction territoriale, agence, plateforme, …) ;
- les Archives nationales pour la direction générale, la direction des systèmes d’information (DSI) et Pôle emploi services (PES).
Tout versement doit être accompagné d’un bordereau descriptif[18]. Pour les structures territoriales, un modèle de ce bordereau est fourni par chaque service départemental d’archives. Pour les documents électroniques (nativement électroniques ou numérisés)[19] conservés dans une GED nationale, ainsi que pour les archives de la direction générale, de la direction des systèmes d’information (DSI) et de Pôle emploi services (PES), la direction des affaires juridiques (DAJ) se charge du versement[20].
Les archives versées restent à la disposition des services dont elles proviennent[21]. Toute demande de communication doit faire référence à la cotation portée sur les inventaires des services d’archives, dont un double est communiqué à Pôle emploi.
Les nouvelles règles de gestion documentaire et d’archivage sont d’application immédiate. Elles s’appliquent tant aux nouvelles archives (flux) qu’aux archives en cours de conservation (stock).
Dans le cadre du déploiement de ces nouvelles règles, le rôle du correspondant-archives régional est primordial. Ses missions sont rappelées en annexe 4. Il lui appartient de déterminer le service responsable de la conservation pour les différentes catégories de documents, et en cas d’externalisation de l’archivage, de porter les nouvelles règles à la connaissance du prestataire et de s’assurer de leur prise en compte dans des délais raisonnables.
Il convient d’informer le département gestion de l’information au sein de la direction des affaires juridiques (DAJ) de toute difficulté rencontrée dans la mise en œuvre de la présente instruction, ainsi que, au fil de l’eau, de toute incohérence ou obsolescence constatée dans les tableaux de gestion documentaire et d’archivage.
Jérôme Rivoisy,
directeur général adjoint
en charge de la maîtrise des risques
[1] Note technique PE_FS_2010_138 du 3 août 2010
[2] Convention entre Pôle emploi et l’Unédic sur les archives de l’assurance-chômage du 22 février 2010
[3] Article R. 212-13 du code du patrimoine
[4] Groupement des Assedic de la région parisienne
[5] Article R. 212-10 à 12 du code du patrimoine
[6] Articles L. 212-4-II et R. 212-19 à 31 du code du patrimoine. Cf. instruction n° 2012-01 du 6 janvier 2012 relative à l’externalisation de l’archivage des documents papier à Pôle emploi et à la mise à disposition d’un marché délégué.
[7] Conformément aux instructions des archives de France sur la base d’une analyse de risque, les tableaux de gestion ne prennent pas en compte l’allongement des durées de prescription résultant de la loi n° 2017-242 du 27 février 2017 portant réforme de la prescription en matière pénale, qui aurait eu pour effet d’augmenter fortement les durées de conservation de certains documents (cf. note d’information DGP/SIAF/2018/003 relative à la durée d’utilité administrative des pièces justificatives des comptes et des dossiers de marchés publics).
[8] Les images fixes et animées, les vidéos, les affiches sont aussi des archives.
[9] Cf. la norme NF Z 42-013 Archivage électronique ; spécifications relatives à la conception et à l'exploitation de systèmes informatiques en vue d'assurer la conservation et l'intégrité des documents stockés dans ces systèmes
[10] RCMA : fiches de contrôle et de maîtrise des activités
[11] Dans ce cas, le demandeur d’emploi repart de l’agence avec le document original papier.
[12] Cf. vade-mecum « Autoriser la destruction de documents sur support papier après leur numérisation. Quels critères de décision ? » publié par le Service interministériel des archives de France http://www.archivesdefrance.culture.gouv.fr/static/7429 (en 2014)
[13] Courrier 2017/D/2613 du 30 janvier 2017
[14] Articles L. 212-2, L. 212-3 et R. 212-14 du code du patrimoine. Cela vaut également pour les données contenues dans le système d’information de Pôle emploi.
[15] Un modèle de bordereau d’élimination national est mis à la disposition des correspondants-archives régionaux.
[16] Ceci vaut également pour les données conservées dans le système d’information de Pôle emploi.
[17] Article L. 212-4 du code du patrimoine
[18] Article R. 212-16 du code du patrimoine
[19] Le versement des documents électroniques doit être accompagné d’un certain nombre d’informations nécessaires à leur exploitation, déterminées au cas par cas.
[20] Ceci vaut également pour les données conservées dans le système d’information de Pôle emploi.
[21] Article R. 212-18 du code du patrimoine et article 34 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978